Juiz de Fora se donne des airs européens quand les autorités de la ville et de la province et la crème de la société locale se sont fait belles pour inaugurer solennellement le Cine-Theatro Central, le 30 mars 1925. Notre Belle Époque, récemment terminée, l’ère de l’or qui progressait par des larges pas et avec un profil industriel et cosmopolite tellement inusité pour une ville du Minas Gerais baroque et agraire, la ville inspirait aux poètes et intellectuels de passage des comparaisons exacerbées à cause de son territoire : elle était la Manchester Mineira, grâce au rythme frénétique de ses usines ; la Athènes Mineira, étant donné son effervescence culturel et artistique ; et encore la Barcelone Mineira, compte tenu de son commerce puissant.
La ville se civilisait, notait déjà en 1920 le poète Murilo Mendes dans une de ses chroniques mondaines au journal local « A tarde ». La proximité avec la capitale du pays – Le Rio de Janeiro francisé du début du siècle – a été la circonstance géographique déterminante pour l’esprit moderne, entrepreneur et sophistiqué de Juiz de Fora de l’époque. Du fait civilisateur tant célébré par le poète, faisait partie le guide chique de la société élégante : fréquenter les théâtres pour assister aux opéras, concerts et présentations de compagnies dramatiques. Idéalisé par l’élite de cette société et avec sa beauté classique, le Cine-Theatro Central a été la plus parfaite traduction de l’image en haute réputation que les propres habitants de la ville avaient d’eux-mêmes. Pendant les décennies qui ont suivi, le Central reste non seulement comme un symbole d’une époque, mais comme un espace vif et ouvert à la célébration de l’art.